Je ne suis pas une runneuse.
Je NE cours PAS.
Je fais plein d’autres trucs pourtant : je sautille, je danse, je patine, je bondis, je galope, je trottine, je me balade, …
Mais courir, c’est pas pour moi.
Du coup, je serais bien en peine de vous expliquer pourquoi j’ai commencé la « Spartacus Serie » cette année.
Peut-être était-ce une manière détournée de glisser un orteil dans des baskets de running ? Un espèce de tremplin pour ce qui allait se jouer aujourd’hui ? L’univers a décidément un sens de l’humour particulier…
Je suis à mi-parcours de mon défi « Spartacus Hero » quand l’invitation tombe : « Et si on se faisait le marathon de Nivelles ? ». La première fois qu’on me le propose. Je ris. Je réponds même pas. Ce genre de truc, c’est pas pour moi.
J’ai des valises de souvenirs plus odieux les uns que les autres de mes cours d’athlétisme en secondaire. Je me revois encore traîner mes 5kg excédentaires autours du parc de la Dodaine et priant tous les dieux de mon Panthéon intérieur pour que ça s’arrête… Il y a quelques années, je courais même pas après le bus… Ne plaisantons pas.
Et pourtant, l’idée fait son chemin.
Mes amis s’inscrivent les uns après les autres.
Ma brownie me convint par son enthousiasme même si c’est un autre ami qui récolte le « oui » final… Je me précipite sur mon ordinateur pour réserver mon dossard parce que je sais que si je m’engage là-dedans, maintenant et tout de suite, je ne pourrai plus reculer.
La « préparation »
Je vous le dis tout de suite… La préparation du run (Bon, pour être honnête, ça se résume à 5 sorties avec les copines une fois qu’on a réalisé avec horreur que le semi serait dans 2 mois) est un ENFER.
Je suis systématiquement le cul entre deux chaises entre l’envie de rattraper mes copines qui doivent partager de l’ADN avec les gazelles, éviter la crise cardiaque, garder la mobilité de mes jambes, lutter contre la hooooooonte (hé oui, la hooooonte) d’être en fin de peloton et de tout laisser tomber en shootant dans un caillou.
Je n’avais plus pleuré de rage ainsi depuis que ma mère avait refusé de m’acheter le château des polly pockets « deluxe », j’avais 10 ans… Je ne voudrais pas que l’échec soit une option…
Je suscite un peu d’incompréhension. Je le sens. Je fais du sport entre 8 et 15h par semaine. Pourquoi je m’inquiète ? Ça devrait être facile, non ? Hé ben non. C’est alors que survint l’illumination.
« Zone de confort », c’est le terme générique employé par tout coach qui se respecte pour empêcher que tu t’enfuies de son cours avant la fin. C’est le mot magique qui fait que, même à-demi noyé dans ta propre sueur, tu trouveras toujours un peu d’énergie cachée pour finir ton entrainement. Je pensais savoir ce que c’était. Je me trompais.
Il n’était plus question de sortir de cette zone en trottinant pour en faire le tour du jardin. Non. Il était question de DÉFONCER LA PORTE A COUP DE TALON POUR SE CASSER SANS REGARDER EN ARRIÈRE.
C’est l’idée qui m’a fait retourner courir.
En quelques séances à peine, mon souffle s’améliore.
J’arrête de suivre la cadence effrénée (ou tout simplement pas en accord avec ma course) de mes copines.
J’ACCEPTE le fait de courir moins vite…
Je trouve ma foulée.
C’est déjà un petit rayon de soleil !
Je n’aime pas l’idée d’être en arrière mais c’est avec des hourras qu’elles m’accueillent. Ça pose un gros sparadrap sur mon petit cœur malmené. Si je viens pour le challenge… Ce sont elles qui me font rester…
« Le jour J »
Je n’ai pas dormi, je suis stressée niveau « veille d’examen », j’ai la crève comme si j’avais vécu dans une cabane en journal depuis une semaine et j’ai absolument pas faim… Mais je suis décidée. Peut-être pas à briller mais… à le terminer !
Je me maquille (pour la confiance), je me fais deux couettes (pour que les petits me repèrent à l’arrivée) et je m’attache mes oreilles de chat (… Euh… Bah… Pour le fun). Je m’attaque à mon bowlcake préparé avec amour et me dirige comme un robot jusqu’à la ligne d’arrivée. Si je réfléchis de trop, je pourrais être tentée de faire demi-tour.
Je rejoins mon groupe dans lequel chacun a son rôle à jouer. Certains sont mes « modèles », d’autres me donnent la force, il y en a un que j’aurais aimé avoir comme père, l’autre qui me fait sourire dès que je l’entends rire… Même de loin… Et, à côté de ceux qui courront avec moi, il y a ceux qui sont dans mon cœur et qui pensent à moi en ce moment-même.
« Un pied devant l’autre. Sans t’arrêter. »
Cela va devenir mon mantra.
Je me fixe 2h30 de course parce que … Il faut bien se fixer un objectif. Puis, je me place derrière le dernier ballon d’allure.
Thunderstruck d’ACDC retentit et, c’est la magie de la musique, ça m’apaise presque immédiatement.
Je m’élance mollement avec ma compagne de course (la foule est super dense) et j’entame ma course avec un bel enthousiasme. Il fait beau. Il fait bon. L’ambiance est super chouette. Je me sens plus malade et ça me semble bien plus facile que notre première reconnaissance. Cet instant de grâce va durer 8km.
8 km, c’est – selon ma fragile expérience – la distance que je peux parcourir sans m’essouffler et sans ressentir de douleurs particulières. Après cela, c’est toujours pareil, du bas du dos jusqu’aux chevilles, ça commence à pincer.
C’est moche parce que c’est exactement le laps de temps qu’il va me falloir pour arriver à cette première réelle côte.
Et je vais me GALÉRER pendant 2km après cette côte pour récupérer « une foulée confortable ».
Je vois ma copine s’envoler avec une pointe de soulagement parce que son allure devenait trop rapide pour et me fait rattraper par des amis qui sont « déjà » sur la fin de leur 12km. Ça parle de frites et de pizzas. De douches. On en est à l’évocation de plaids tous chauds quand on voit la bifurcation entre les coureurs 12km et 21km.
GROS MOMENT DE DOUTE.
Qu’est ce que tu fais là ?
Pourquoi tu t’infliges ça ?
12km, c’est déjà le max de ce que tu ais jamais fait… Comment peux-tu seulement espérer en faire le double ?
Tu as vu trop gros… Tu vas te planter… Limite la casse…
Mais je prends quand-même le chemin des 21km. Pourquoi ? Ça tient en une nouvelle question qui répond pourtant à toutes les interrogations précédentes : » Qu’est ce qui t’a poussé à venir ici ? « .
Et dans ma tête, elle résonne avec l’exacte voix et l’exacte intonation du coach qui, inlassablement, nous la répète, chaque semaine qui passe depuis les presque-deux-ans que j’ai passé au Basic. Mais c’est la première fois que j’ai envie d’y répondre. La première fois que je comprends l’intention derrière.
Je suis ici parce que je PEUX le faire
Je suis ici parce que j’ai décidé de bouger mes fesses de mon canapé pour faire quelque chose de plus grand, de plus fort, de plus intense que ce que je peux simplement subir.
Je suis ici pour aller plus loin que je ne pensais jamais aller.
Je suis ici parce qu’il y a encore quelques années, je ne pouvais pas monter ma rue pour aller prendre le bus sans être essoufflée.
Je suis ici parce que j’ai une bataille à gagner.
Elle ne se déroule pas ici, contre mes copines. Elle ne se gagnera pas tout à l’heure, sur le podium, pour quelqu’un en particulier.
C’est une bataille de tous les jours, de chaque instant pour être la personne que je VEUX être plutôt que de jouer le rôle qu’on m’a imposé.
Je suis ici parce que je VEUX être la meilleure version de moi-même.
C’est une bataille contre soi. Repousser la limite des possibles. Faire de l’impossible un possible.
Alors NON. Je ne me « contenterai » pas de sauver les meubles.
Je ne me « contenterai » même pas de me trainer jusqu’à la ligne d’arrivée.
Je me suis pas bouger jusqu’ici et infliger tout ce stress pour être médiocre.
Je veux briller !
Ça va être un deuxième instant de grâce du 13ème au 18ème kilomètre.
La sensation « d’avaler la route », je ne trouve rien de mieux approprié.
J’ai perdu ma copine mais je sais que je la retrouverai bientôt. J’ai dépassé mon ballon. On pourra même fêter ça.
Je puise mon énergie ailleurs.
Chaque sourire, chaque encouragement, chaque bouteille d’eau, chaque coup de djembé me donne le sourire. Je fanfaronne un peu pour taper dans les mains tendues des petits bouts qui longent la route. L’un d’eux se retourne vers sa maman comme si j’étais une athlète pro.
Je souris mais les ennuis pointent de nouveau leur nez. C’est la dernière grosse côté et chacune de mes jambes semble peser 10kg. J’ai perdu la sensibilité de mon pied gauche, ce qui doit me faire courir comme un poulet sans tête et j’ai les épaules crispées comme si j’avais été clouée au pilori.
Au 19ème km, je prends une poignée de raisin et… C’est le drame. Ma mâchoire semble peiner à fonctionner et le goût sucré du fruit me donne la nausée. Je les rends à leur créateur dès le premier bosquet devant l’air inquiet des personnes autour de moi… Je souris pour ne pas les inquiéter même si, au fond de moi, j’ai vaguement peur que tout mon petit corps ne commence à me lâcher. Tant pis. Mon enthousiasme me portera pour les deux derniers kilomètres.
Le dernier kilomètre
Le dernier est le plus pénible. Certains des autres coureurs n’ont plus que l’énergie du désespoir.
Je tape sur l’épaule d’un « superman », je souris à une nana qui s’accroche à son compagnon (enfin… Je l’espère).
Ça devient très dur.
J’ai peur de me retrouver toute seule à l’arrivée et… Je suis sortie de mes rêveries par un « allez maman ».
Je vois mes trois hommes accoudés à la barrière. Le soleil leur fait cligner les yeux mais ils les gardent ouverts pour être sûrs de m’apercevoir… Je tapote mon dossard pour rappeler à mon Amour que je porte fièrement la date de notre mariage sur le cœur (1812) et que je l’ai portée jusqu’au bout.
Je remets mon plus beau sourire.
J’entends (et ce… Bien avant de la voir) notre plus fidèle supporter qui a fait le déplacement pour nous…
Je retrouve mon cocon et, alors que je ne pensais plus avoir un gramme d’énergie, en passant la ligne d’arrivée, je lève les bras …
Je viens de courir mon premier semi-marathon
« Je suis ici parce que je VEUX être la meilleure version de moi-même. »
Exactement le même motif qui m’a poussé à faire les 12 km en 2013. Moi qui n’avait plus fait de sport depuis plusieurs années.
Je l’ai fait en deux heures moins quelques secondes, mais je l’ai fait. Suivie par le « vélo balai », ce qui pouvait être décourageant.
Ce dimanche, j’ai fait les 5 km, et j’étais bien loin du « vélo balai ». J’étais entourée d’autres femmes qui couraient, à une allure qui me convenait, profitant du moment.
Ça aurait pu être décourageant mais tu l’as fait !
Quelle volonté 🙂
Ta tenacité est ta force… A défaut de jambes de gazelles, on va se tailler un mental de lionne
:-*
Bravo pour ton courage
le premier est le plus dur
courage pour les suivants et encore bravo
😉
quelle superbe plume tu es!
et à te lire, j’ai presqu’envie d’en faire un aussi de semi-marathon! ….
Hé hé hé ! Mon objectif est atteint alors :p
Je ne peux que t’inviter à te lancer ^^